"La promesse de l'aube" de Romain Gary * * * * * (Ed. folio, 1980, première parution, 1960)
Romain Gary a eu beaucoup d'amour pour sa mère, et il a beaucoup d'humour pour le raconter ! Il fut un petit garçon choyé, admiré, adulé ; sa mère, une ancienne actrice d'origine russe avait un "sacré tempérament" et un amour absolu pour son fils. Ces deux-là ont traversé les pays et les difficultés main dans la main, même si parfois la fougue et les exagérations maternelles étaient difficiles à porter pour le petit Romain. "La promesse de l'aube", une autobiographie sans doute romancée mais surtout un hymne magnifique à l'amour maternel !
Quelques passages : "Avec l'amour maternel, la vie vous fait à l'aube une promesse qu'elle ne tient jamais."
Chaque fois que ma mère revenait de ses courses en ville et qu'elle s'asseyait sur une chaise - les premières marques de vieillesse apparaissaient déjà sur sa figure - je lui lisais les strophes immortelles qui devaient jeter le monde à ses pieds. Elle les écoutait toujours attentivement. Peu à peu, son regard s'éclairait, les traces de fatigue disparaissaient de son visage et elle s'exclamait, avec une conviction absolue : Lord Byron ! Pouchkine ! Victor Hugo ! "
"... je découvris l'humour, cette façon habile et entièrement satisfaisante de désamorcer le réel au moment même où il va vous tomber dessus. L'humour a été pour moi, tout au long du chemin, un fraternel compagnonnage ; je lui dois mes seuls instants véritables de triomphe sur l'adversité."
"Il faut attaquer tout de suite, me dit-elle. Je dus paraître un peu surpris, parce qu'elle précisa : il faut marcher tout droit sur Berlin. ... J'ai toujours regretté, depuis, qu'à défaut du général de Gaulle, le commandement de l'armée française ne fût pas confié à ma mère. Je crois que l'état-major de la percée de Sedan eût trouvé là à qui parler. Elle avait au plus haut point le sens de l'offensive, et ce don très rare d'inculquer son énergie et son esprit d'initiative à ceux-là même qui en étaient le plus dépourvus. Qu'on veuille bien me croire lorsque je dis que ma mère n'était pas femme à demeurer inactive derrière la ligne Maginot, avec son flanc gauche complètement exposé."
"Au cours des derniers jours qui avaient précédé sa mort, elle avait écrit près de deux cent cinquante lettres, qu'elle avait fait parvenir à son amie en Suisse. ... Je continuai donc de recevoir de ma mère la force et le courage qu'il me fallait pour persévérer, alors qu'elle était morte depuis plus de trois ans. Le cordon ombilical avait continué de fonctionner."
Lu dans le cadre du Blogoclub (Blog de Sylire)