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Les 2 bouquineuses ont aimé
24 mai 2023

"Le secret de Sybil" de Laurence Cossé * * * * * (Editeur NRF Gallimard ; 2022)

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Laurence Cossé réussit ici le défi de raconter et donc de scruter en détail une amitié entre deux jeunes filles, dans la deuxième moitié du XXème siècle ; c'est extrêmement juste, parfaitement conforme à ce que beaucoup peuvent se souvenir avoir vécu.

C'est une jeunesse particulière qui est narrée ici, celle de petites puis jeunes filles des années soixante-soixante-dix, appartenant à des milieux plutôt favorisés, vivant en proche banlieue parisienne ; mais c'est aussi une histoire universelle, quelle jeune fille n'a pas eu un chagrin d'amitié avec une autre fille de son âge ? N'est-ce pas souvent une des premières désillusions d'adolescente ?

Le récit est construit de façon intelligente et fine ; le texte est précis, écrit dans une belle langue simple et dépouillée, et raconte une véritable histoire d'amour qui, pour idéale qu'elle fut pendant plusieurs années, s'est brisée au moment de l'éclosion de la fabuleuse beauté de Sybil, la jeune fille accédant à un niveau supérieur, laissant Laurence au niveau des communs des mortels.

Sur le ton de la confidence intime, tout en faisant revivre avec talent des familles, des établissements scolaires, tout une société d'il y a cinquante ans, l'autrice nous dévoile l'histoire douloureuse de celle qui fut une grande amie, qui s'éloigna avec mépris, et revint quelques fois auprès d'elle. Laurence se demande comment elle a pu passer à côté du "secret" de Sybil, qu'elle a pourtant beaucoup aimée.

On ne connaît jamais vraiment quelqu'un, même proche, même très cher ; n'est pas une des principales difficultés de l'existence, ne pas savoir ce qu'il se passe dans la tête de l'autre ?

Premières phrases : " De dix à quatorze ans, j'ai connu l'amour. Je ne le savais pas, j'aurais dit qu'il s'agissait d'amitié. J'ai fait le rapprochement bien plus tard, après m'être essayée à ce qu'il est convenu d'appeler amour : ce que j'avais connu à dix ans n'était pas d'une autre nature. À ceci près qu'il n'entrait dans la joie d'alors ni saisons ni brouillards, ce qui est rarement le cas entre adultes. C'est la sécurité affective dont j'ai le souvenir..."

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