"Les belles endormies" de Yasunari Kawabata * * * *
Très beau livre du prix nobel de littérature 1968 ; c'est l'histoire d'un vieil homme, Eguchi, qui va régulièrement, la nuit, dans une mystérieuse maison où des jeunes filles sont couchées, profondément endormies. Elles sont à la disposition, en quelque sorte, de vieillards qui ne sont plus vraiment des hommes. Dès le début, la règle est claire : le client n'essaie pas de réveiller la jeune fille qui de toute façon ne se réveillerait pas et ne saura jamais qui est venu se coucher à côté d'elle ; le client est "de tout repos" et ne fait "aucun mal" à la petite. C'est donc ici l'histoire de quatre nuits passées dans cette maison, avec des filles différentes à chaque fois ; toutes les pensées et les sentiments d'Eguchi placé dans cette situation très étonnante sont exprimés avec une grande délicatesse : ses observations, ses souvenirs des femmes de sa vie, sa crainte de la décrépitude et de la mort... Un livre qui parle d'érotisme et de mort, de famille et de beauté de la nature. L'écriture est belle et étonnante : délicate, précise, avec parfois des répétitions ; on peut penser à des phrases de M. Proust.
Premières phrases : "Et veuillez éviter, je vous en prie, les taquineries de mauvais goût ! N'essayez pas de mettre les doigts dans la bouche de la petite qui dort ! Ca ne serait pas convenable !" recommanda l'hôtesse au vieil Eguchi.