"Reine de coeur" de Akira Mizubayashi * * * (Ed. Gallimard ; 2022)

... Ah, Anna, mon amour, qu'est-ce que je suis devenu dans cette machine infernale, dans le quotidien de cette guerre qui te déshumanise jusqu'à la dernière goutte de sang ? J'ai honte... J'ai honte... Je ne suis plus le Jun Mizukami que tu as connu, je ne suis qu'un soldat robotisé sans nom et sans âme, léger comme une minuscule graine de pissenlit, dans cette armée de huit cent mille hommes interchangeables à l'infini... Je suis tombé si bas, si bas... J'aimerais tant redevenir ce que j'étais à Paris avec toi...
(p 184)

Ce soldat japonais, interchangeable, qui en fait n'a aucune existence propre... C'est cela qui est principalement dénoncé par l'auteur. La folie de la guerre, la brutalité des combats, mais surtout la violence qui règne à l'intérieur de l'armée japonaise, sous prétexte d'obéir à l'empereur, divinité sur la Terre.

Nous sommes au moment de la seconde guerre mondiale et deux amoureux ont été séparés : Anna, la maman de la petite Agnès dont le père n'est autre que Jun, venue étudier la musique - il est altiste - en 1937 à Paris ; déjeunant tous les jours Chez Fernand, il a rencontré la nièce du patron, apprentie institutrice et serveuse dans le bistrot de son oncle quand elle n'avait pas de cours.
Ce fut un amour intense mais court ; plus tard, ce sont leurs petits enfants qui se trouveront...

 L'omniprésence de la musique - même dans la construction du récit - est un réel atout pour l'histoire racontée ici ; et si le livre présente vraiment un très bon début, si le sujet est original et intéressant, l'écriture devient décevante et le recours aux journaux intimes des différents personnages est un peu trop utilisé par l'auteur.

Donc une lecture plutôt agréable, avec de très bons moments, et d'autres plus convenus.